Les Compagnons d’Emmaüs
Œuvre de Claude Gruer, sculpteur qui avait son atelier à Solesmes dans la Sarthe. Réalisé en pierre réfractaire polychrome, ce haut-relief illustre la rencontre entre deux disciples et le Christ Ressuscité sur la route entre Jérusalem et le village d’Emmaüs, selon le récit de Saint Luc dans son Evangile (Lc 24, 13-35). Il est placé sur le devant du maître-autel, c’est à dire la table du partage du pain.
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Le partage du pain : Jésus-Christ est le berger qui cherche ces deux brebis égarées. Comme toujours, il éclaire doucement leur conscience et les conduit habilement à la vérité. Écouter Jésus prépare ses deux disciples à le reconnaître quand il prend le pain, le rompt, le bénit et le leur donne : les mêmes gestes qu’à la dernière Cène. Après avoir reconnu le Seigneur dans la « fraction du pain », toutes leurs dispositions changent, même leur manière d’évaluer les événements et les changements de situation. Ils s’étaient arrêtés pour la nuit, mais après avoir rencontré le Seigneur, ils se lancent au milieu de la nuit retrouver les autres pour partager leur expérience avec eux.
Tout l’épisode des pèlerins d’Emmaüs ressemble à une messe : les deux liturgies, de la Parole (Jésus explique les Écritures) et de l’Eucharistie (Jésus rompt le pain), y sont présentes. Nous pouvons ainsi relire ce passage comme une description profonde de la conversion que la messe met en œuvre.Toute les étapes structurant la messe sont ainsi représentées dans le cheminement des disciples d’Emmaüs, depuis une rencontre dans la désespérance d’un monde matérialiste où le message du Christ n’avait pas été compris, jusqu’à l’envoie en mission plein de l’espérance de la Bonne Nouvelle, avec son point culminant central, le Christ partageant le pain, son propre corps.
La liturgie de la messe s’efforce de nous faire accomplir le même passage de l’incrédulité à la foi, du vide existentiel à l’espérance joyeuse. Nous commençons par la liturgie pénitentielle, qui nous fait reconnaître combien notre cœur est sans intelligence, lent à croire (Lc 24,25) ; nous écoutons et expliquons les Écritures qui illuminent le mystère du Christ. Puis le Seigneur, dans la personne du prêtre, prend le pain, dit la bénédiction, le rompt et le donne(24,30) : moment culminant de la consécration, où Jésus se rend substantiellement présent et ouvre nos yeux intérieurs par la foi…
La messe se prolonge alors par l’action de grâce (notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous ?), et débouche sur l’envoi en mission (ite missa est), comme les disciples qui reprennent immédiatement leur chemin, mais dans l’autre sens : au lieu de fuir Jérusalem, ils y retournent pour témoigner de ce qu’ils ont vécu.
Luc 24, 13-35 : Le troisième jour après la mort de Jésus, deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem, et ils parlaient ensemble de tout ce qui s’était passé. Or, tandis qu’ils parlaient et discutaient, Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux. Mais leurs yeux étaient aveuglés, et ils ne le reconnaissaient pas. Jésus leur dit : « De quoi causiez-vous donc, tout en marchant ? » Alors, ils s’arrêtèrent, tout tristes. L’un des deux, nommé Cléophas, répondit : « Tu es bien le seul de tous ceux qui étaient à Jérusalem à ignorer les événements de ces jours-ci. » Il leur dit : « Quels événements ? » Ils lui répondirent : « Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth : cet homme était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple. Les chefs des prêtres et nos dirigeants l’ont livré, ils l’ont fait condamner à mort et ils l’ont crucifié. Et nous qui espérions qu’il serait le libérateur d’Israël ! Avec tout cela, voici déjà le troisième jour qui passe depuis que c’est arrivé. A vrai dire, nous avons été bouleversés par quelques femmes de notre groupe. Elles sont allées au tombeau de très bonne heure, et elles n’ont pas trouvé son corps ; elles sont même venues nous dire qu’elles avaient eu une apparition : des anges, qui disaient qu’il est vivant. Quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas vu. » Il leur dit alors : « Vous n’avez donc pas compris ! Comme votre coeur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Messie souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ? » Et, en partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur expliqua, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait. Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient, Jésus fit semblant d’aller plus loin. Mais ils s’efforcèrent de le retenir : « Reste avec nous : le soir approche et déjà le jour baisse. » Il entra donc pour rester avec eux. Quand il fut à table avec eux, il prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards. Alors ils se dirent l’un à l’autre : « Notre coeur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route, et qu’il nous faisait comprendre les Écritures ? » A l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. Ils y trouvèrent réunis les onze Apôtres et leurs compagnons, qui leur dirent : « C’est vrai ! le Seigneur est ressuscité : il est apparu à Simon-Pierre. » A leur tour, ils racontaient ce qui s’était passé sur la route, et comment ils l’avaient reconnu quand il avait rompu le pain.