Boulonnais, un phare pour la chrétienté ? chapitre 2 : phare judéo-chrétien à la catholicité singulière

Le Boulonnais et sa cathédrale
phare pour la chrétienté au XIXe siècle ?
Quel rôle pour Wimereux ?

Conférence donnée par Richard Honvault
à l’église de Wimereux, le 1er juillet 2017,
à l’occasion de « la Nuit des églises »

(suite)

Chapitre 2 :
Un phare judéo-chrétien au XIXe siècle
autour d’une catholicité singulière

2.1   Le mouvement de construction d’églises et le rétablissement du culte marial font-ils du Boulonnais un phare catholique ? NON même si cela y contribue. L’église de Wimereux en témoigne

  • Un lieu de culte marque la présence d’une religion, l’existence même d’une communauté de croyants.
  • Création de 4 nouvelles paroisses sur Boulogne :
    • St Pierre des Marins, St Vincent de Paul, St François de Sales et St Michel,

  • Sans oublier les nombreuses chapelles, monastères, couvents, etc…

Cet élan de construction touche l’ensemble du Boulonnais :

  • L’église de St Martin à St Martin-Boulogne
  • L’église de l’Immaculé Conception à Wimereux en 1866
  • L’église St Thérèse d’Avila à Pont de Briques
  • Les églises de Pittefaux, Equihen, Le Portel etc…
  • Le décor intérieur de Wirwignes par l’abbé Paul Lecoutre

Ce qui se passe dans le Boulonnais se passe dans toute la France :

  • 1/3 environ des églises françaises datent du XIXème siècle.
  • Le simple fait de rétablir le culte marial ne fait pas de Boulogne un phare.
  • Entre 1864 et 1872, 50 chapelles à la Vierge sont construites et en 1890, le diocèse  d’Arras compte 90 pèlerinages à la Vierge.

Ce qui fait du Boulonnais un phare judéo-chrétien est à chercher ailleurs.

2.2    Un passé religieux flamboyant pour le Boulonnais

3 éléments forts

1er élément : Boulogne est le plus vieux lieu de culte marial de France après le Puy-en-Velay.

  • Apparition de la Vierge vers l’an 633-636.
  • Le pèlerinage à notre Dame est l’un des plus illustres au Moyen-Age de toute la chrétienté ; tellement important que le surnom de Boulogne est la « ville de Notre-Dame ».
  • La Vierge boulonnaise est la seule d’Europe a avoir reçu l’hommage de tant de personnalités : 14 Rois de France et nombres de religieux.
  • Jusqu’en 1789, la Vierge boulonnaise est tellement populaire que c’est le seul pèlerinage a être exporté, c’est-à-dire que Notre-Dame de Boulogne est vénérée dans d’autres sanctuaires.
  • Un symbole : le nom Boulogne est tellement associé à la Vierge Marie que les habitants du village de Mesnuls-lès-Saint-Cloud, débaptise en 1330 le nom de village pour celui de Boulogne-la petite puis Boulogne-sur-Seine

  • A travers la Vierge, le Boulonnais est un centre politique international :
    • 25 janvier 1308 : Mariage d’Edouard II d’Angleterre avec Isabelle de France
    • 1532 le camp du Drap d’Or entre François Ier et Henry Tudor Roi d’Angleterre afin de conclure un traité d’alliance contre le Grand Turc. Les deux Rois logèrent également à l’abbaye Notre Dame, cette visite fut l’occasion de grandes festivités.

 

2ème élément : Un diocèse de saints

Boulogne-sur-Mer est le siège d’un évêché de 1559 à 1791 remplaçant l’antique évêché de la Morinie : Thérouanne.

Fait rare, cet évêché de Boulogne compte de nombreux saints parmi lesquels :

  • Ste Godeleine est fêtée dans le diocèse d’Arras le 6 juillet, à Wierre-Efffroy, mais aussi en Belgique (diocèse de Tournai-Noyon, à l’époque). Née vers 1049, de Hemrid, seigneur de Wierre-Effroy (Boulonnais), et de Ogine, d’éducation très pieuse et dévouée aux pauvres, elle est mariée avec Bertolf, de Ghistelles en Flandres. Mariée, battue par sa belle-mère et son mari. Ce dernier l’a fait assassinée par ses valets le 6 juillet 1070. Bertolf se remariera. Du second mariage naitra une fille aveugle. Elle sera guérie par un miracle de la sainte. Le mari se converti et se fait religieux. La sainte guérisseuse pour les femmes battues et les enfants malades.

  • Ste Ide de Lorraine (1040-1113) Descendante de Charlemagne et nièce du Pape Etienne XI, elle épouse le Comte Eustache de Boulogne qui sauve la vie de Guillaume le Conquérant lors de la bataille d’Hastings. Belle-sœur de Geoffroy, évêque de Paris et chancelier du roi de France Philippe Ier, son influence politique est considérable. Ses fils, Godefroy de Bouillon et Baudouin sont les premiers rois francs de Jérusalem. Sa petite fille Mathilde monte sur le trône d’Angleterre. Elle utilise cette fortune pour venir en aide aux pauvres et construire ou restaurer monastères et églises : Marck en Calaisis, le Wast, St Wulmer de Boulogne, St Wulmer de Samer, etc….Elle est inhumée à l’église de le Wast..Après de nombreuses translations son corps repose finalement au couvent des bénédictines de Bayeux. Le roi Louis XI la nomma patronne de Boulogne et de son comté en avril 1478. Elle est fêtée liturgiquement le 13 Avril.
  • L’histoire de la relique du Saint Sang
    • L’an 1100, de son retour de Croisade pour tenir la charge de comte de Boulogne, Eustache III remet à sa mère Ide ( Sainte Ide) un certain nombre de reliques. Reliques qu’avaient confié ses deux frères : Godefroy de Bouillon et Baudouin. Parmi ces reliques : un morceau du tissu recouvert du Saint Sang du Christ remis par le Patriarche de Jérusalem.
    • Quand en 1791 le mobilier de Notre-Dame est dispersé, le reliquaire est soustrait par un paroissien qui le protège et le restitue en 1836.
    • Lors de la 2ème Croisade, le comte de Flandres, Thierry d’Alsace (1099-1068), ramena un autre morceau de cette relique qui fut installé à Bruges

Reliques : c’est ce qui reste, après sa mort, du corps d’un saint ou d’un martyr; objets ayant été à son usage, instruments de son supplice, considérés comme des objets sacrés et auxquels on rend un culte.

Un reliquaire : est un réceptacle, généralement un coffre destiné à conserver les restes terrestres de saints personnages ou d’autres objets qui ont été sanctifiés par leur contact en les préservant de la corruption et des souillures. Le reliquaire pour fonction aussi de manifester la gloire et le prestige du saint et aussi la qualité de l’artisanat d’une ville, corporation etc…

  • Au XIXème siècle, la société renoue avec le passé de Saint et en accepte d’autres…
    • St Patrick, patron des Irlandais : les contemporains de l’époque relance l’idée qu’il soit né à Boulogne.
    • St Benoit Joseph Labre. Béatifié le 20 mai 1860.

 

3ème élément : Un vieil héritage diocésain

  • Le traité du Cateau-Cambrésis de 1559 confirmé par la bulle pontificale du 30 mars 1567 divise le diocèse de Thérouanne en trois :
    • Ypres 
    • St Omer
    • Boulogne qui récupère la majeure partie.

La prestigieuse abbaye Notre-Dame de Boulogne devient le nouveau siège épiscopal de l’un des plus vieux diocèse de France. Celui de Thérouanne est mentionné dès le VIIème siècle sous le règne de Dagobert….

2.3 La situation de l’ancien évêché de Boulogne meilleure que le reste du diocèse d’Arras

Un Boulonnais qui « porte » » le diocèse d’Arras et qui devient le pilier de l’existence de ce nouveau diocèse. Ironie du sort : leur capitale n’est plus le siège de l’évêché.

Source : Rapport du Préfet du 4 juillet 1802

Le nouveau diocèse d’Arras : un diocèse sans unité dominé par la coutume boulonnaise

CONCLUSION :

Pour des religieux bâtisseurs, comme Mgr Haffreingue ou Leullieux, cette situation est une aubaine :

  • Une aubaine religieuse = l’image catholique reste visible et donc présente dans les esprits. L’image du Christ n’est jamais totalement disparue durant la période révolutionnaire.
  • Une aubaine financière = pas besoin de dépenser des milliers de francs pour racheter les églises ou pour les reconstruire. Seulement les réparer. En fait, pour le Boulonnais, une seule manque à l’appel : la cathédrale de Boulogne.
  • L’argent est donc disponible pour construire de nouveaux édifices dont une cathédrale.

2.4 Une spécificité : Au XIXème, une région à la fois en plein essor démographique et qui reste croyante et pratiquante

Le clergé et Mgr Haffreingue s’appuient sur une situation démographique et religieuse exceptionnellement favorable où deux phénomènes cohabitent :

1er phénomène : Un essor démographique :

L’arrondissement de Boulogne -sur-Mer connaît la plus grande croissance du Pas –de- Calais.

2ème phénomène : Tout au long au XIXème siècle, la population boulonnaise reste très pratiquante, à la différence du bassin minier et de l’Arrageois.

Au XIXème le Boulonnais est une terre d’accueil de population venant d’autres régions françaises (Normandie, etc…) et d’Europe (Suisse, Italie, Royaume-Uni).

Ces nouveaux arrivants qui feront souches sont et resteront pratiquants quelque soit leur religion d’origine.

Exemple : En 1895, dans les secteurs s industriels de Marquise, Etaples, Desvres, Audruicq, Fruges, voient encore une bonne moitié de leur population accomplir leurs Pâques contre 10% Lens Béthune.

Existence d’un diphormisme sexuel qui va s’accentuer tout au long du siècle. Au XIXème siècle, la religion est une affaire de femmes.   Le Boulonnais n’est pas spécifique, c’est une tendance nationale.

Conclusion : le nombre de paroissiens est donc en forte hausse et avec lui le besoin d’encadrement (lieu de culte, clergé etc..) et le produit des quêtes et des dons connaît une croissance vertigineuse.

Attention : il y a des manifestations hostiles

  • Lors de la Révolution de 1830 :   le chantier de la cathédrale nécessite d’appeler la garde nationale pour en limiter le pillage
  • En 1855 au début de la construction de l’église St François de Sales, l’abbé Leullieux est accueilli par des jets de pierre.

2.5 Un homme singulier : Benoît-Agathon Haffreingue (1785-1871)

  • Mgr Parisis écrit : « Cet homme est un vrai prodige sous la plus modeste enveloppe».
  • Personnalité :
    • Boulonnais, Amoureux du Boulonnais, sa culture, sa modernité, sa rigueur font qu’il veut le meilleur et pour lui ça passe par Dieu et la Vierge Marie dont le culte est pour lui essentiel.
    • Energique, tenace, un bâtisseur, c’est un chef ! Il rassemble le monde chrétien (et non que politique) derrière son action.
    • C’est tout le contraire d’un mégalomane.
    • Il aime la politique, affiche ses idées mais ne franchira pas le pas de se présenter à une élection.
  • C’est un grand communiquant : il sait côtoyer les « plus grands » afin de faire connaitre son œuvre et sortir le Boulonnais de l’anonymat.
  • Une référence en matière éducative :
    • On compare les autres institutions par rapport au travail d’Haffreingue : En 1852 Mgr Parisis écrit : « St Bertin a surpassé Haffreingue »
    • Souci de lutter contre l’ignorance et l’inculture : élever la condition humaine. C’est un pédagogue : l’ensemble des grisâtres de la crypte le montre…..
    • Reprenant en 1815 la direction du Pensionnat de l’Abbé Compiègne, il crée une institution qui porte son nom de son vivant : l’Institution Haffreingue.
    • L’institution Haffreingue est reconnue pour la diversité de son enseignement : développer la réflexion, l’autonomie intellectuelle et l’esprit critique.
  • 1853 : décoré de la Croix de la Légion d’Honneur
  • Le 11 février 1859 le pape Pie IX l’élève à l’une des plus hautes titulatures : Protonotaire apostolique. Un protonotaire apostolique a le rang de prélat (équivalent à un évêque et un cardinal ) Il a la charge d’enregistrer les actes pontificaux et d’en surveiller les expéditions et l’applications.
  • Il fut intégré à la liste des Prélats de la maison de la Sainteté..
  • C’est un bâtisseur plus qu’architecte : avec la cathédrale il n’est pas à son coup d’essai mais sa 4ème construction :
    • L’église du petit séminaire,
    • La Chapelle des Ursulines abritée dans l’ancien palais des ducs d’Aumont .
    • Eglise du Portel style classique

 

2.6 Une région véritable vivier de religieux et aux fortes personnalités à l’image de Mgr Haffreingue

  • 3 des 4 écoles secondaires ecclésiastiques dont sont issues les prêtres se situent dans l’ancien diocèse de Boulogne (entre 1802 et 1816 : Audinghen (l’abbé Compiègne), Dohem et Amettes ; Celle dans le diocèse d’Arras : Sibiville.
  • L’ancien diocèse de Boulogne : un vivier pour le recrutement pour le clergé séculier et régulier

  • Un symbole : la ville boulonnaise du Portel
  • Sur 6000 hab, en 1925, Le Portel a donné :
    • 52 prêtres
    • 200 religieuses,
    • Plus 40 religieux des Frères des écoles chrétiennes en 100 ans.
    • En 1936 , le Portel a donné son 70ème prêtre.
  • A la différence de l’Arrageois, le clergé boulonnais fournit des prélats. Le Père Césaire recense 10 prélats en 50 ans.
  • Source : les publications du Père Césaire et d’Yves-Marie Hilaire.
  • C’est un clergé composé de fortes personnalités soucieuses de la culture du résultat, libérée des conventions, avant tout pragmatique. Peu importe le chemin pris du moment que la Foi l’emporte.

Exemple : L’abbé Jean-Baptiste Rémont 1er vicaire de St Nicolas fondateur de la paroisse St Vincent de Paul pour le quartier de Capécure.

  • Un clergé travaillant l’éducation pour tous
    • L’abbé Deltour (1809-1880) 1er curé du Portel en 1837 consacre une heure par jour au catéchisme et fait apprendre aux matelotes l’habitude de la messe et de la communion fréquente.
    • Son successeur L’abbé Dussart ouvre une école libre des Frères Chrétiens (l’actuel école St Jean Baptiste).
  • Un clergé engagé et reconnu dans les enjeux scientifiques et culturels
    • L’abbé Daniel Haigneré (1824-1893). Archiviste de la ville, grand historien. Critique averti, il publia les chartes de St Bertin.
    • L’abbé Alexis-Timothée Bouly (1865- 1958). Connu pour ses talents de sourcier , herboriste et de guérisseur, il est le père de la radiesthésie française.

  • Un clergé avant-gardiste sur le plan sociétal
    • l’abbé Jean-Baptiste Joncquel Curé de st Nicolas de 1887 à sa mort en 1911.
      • Conférencier populaire, réclame une législation sociale dès 1870.
      • Il créé un cercle ouvrier qui rassemble de 1874 à 1880 entre 500 et 700 ouvriers dont 150-200 assidus.
      • Le 18 avril 1875, Mgr Lequette préside une assemblée de 1500 hommes parmi lesquels 1200 ouvriers et artisans. L’abbé Joncquel y plaide pour le repos dominical
  • Un clergé secondé par une foule de laïcs
    • L’importance des laïcs rémunérés au sein des paroisses : l’exemple le plus significatif : En 1840, la paroisse St Nicolas (15000 hab.) occupe 8 ecclésiastiques et 23 laïcs tous salariés grâce aux quêtes et aux dons. (Sources : Arch paroissiales de St Nicolas).
    • Avec le soutien du clergé, Boulogne-sur-Mer est la ville porte drapeau des Ligues Féminines,
      • Ces ligues sont créées pour le vote des femmes et allient des nobles, des bourgeoises, des paysannes, des salariés, etc…
      • Boulogne est le siège d’une organisation diocésaine rassemblant 43 000 adhérentes en 1911 grâce à deux femmes : Isabelle de la Barre de Nanteuil et Marie-Josèphe d’Héricault (1872-1957).

2.7 Une singularité boulonnaise : la plus forte concentration de religieux réguliers au Nord de Paris

  • Boulogne-sur-Mer, capitale et centre de gravité de la région boulonnaise se singularise au XIXème par une pléthore de congrégations unique au moins au Nord de Paris mais peut-être en France.

  • Wimereux ne bénéficie pas d’implantation de congrégation (hormis les 3 soeurs de l’Immaculée-Conception installées dans l’asile derrière l’église par l’abbé Lebègue en 1873 et qui durent partir en 1904 avec la loi interdisant aux congrégations d’enseigner)
  • L’importance des ordres mendiants montre à quel poids, ce clergé se préoccupe et s’occupe de la population.
  • Le clergé régulier représente au moins 500 individus pour une commune de 30000 habitants soit 1,5% de la population. La France compte, en 1850, environ 50000 religieux réguliers soit 0,14% de la population (50000/35,6 millions d’habt)

Le clergé régulier qui vient du latin « clerus regularis » désigne les membres du clergé, soumis à une règle de vie, répondant à la règle d’un ordre monastique.

Le clergé régulier vit le plus souvent à l’écart des hommes dans des monastères ou des abbayes, alors que le clergé séculier vit « dans le siècle », parmi les laïcs.

  • L’exemple de l’implantation de la communauté des Sœurs de la Visitation (1841-2008) prouve que l’aura de Boulogne surpasse celle de toutes les autres villes religieuses de France. (photo : rare représentation de l’ancien bâtiment des Sœurs de la Visitation. L’actuel bâtiment a été reconstruit après 1945)

  • Les Frères Rédemptoristes ( 1857-1908) Rue Faidherbe. L’Eglise Saint Alphonse de Liguori fut bénite le 1er aout 1860 ainsi que le couvent des Rédemptoristes. Bâtiments existent toujours
  • Les Ursulines (1810-1911) Rue d’Aumont dans l’ancien Hôtel des gouverneurs. Bâtiment détruits en partie durant la seconde guerre mondiale. Hôtel des impôts actuel. Ordre religieux présent de 1624 -1789). 1760 ; construction de classes de collège, couvent vendu et détruit fin XVIIIème. rue de l’Oratoire
  • Les Sœurs des Annonciades (1792-1808), Place de la Résistance. Les bâtiments existent toujours, c’est aujourd’hui la bibliothèque des Annonciades
  • Les Dames de Nazareth (1961-1908) installé Rue Beaurepaire actuellement le lycée Mariette

  • Les Augustines , rue Loeuilleux (1850-1980)

  • Les Bénédictines, installées rue Cazin. Après 1908, le bâtiment accueillera le lycée technique. Le bâtiment sera rasé dans les années 80.

  • Les Petites Sœurs des Pauvres (1861-1951) qui installe l’une des 1ère Maison de retraite (rue de Wicardenne). Aujourd’hui c’est l’école Wicardenne.

  • Les Franciscaines de la Propagation : elles forment le corps infirmier de la clinique Houzel et Ste Famille mais leur couvent se trouve rue F Adam (actuellement la Cie général des eaux) et leur chapelle existe toujours à l’intérieur des locaux de la Bourse du Travail.

  • Sœurs Notre-Dame du Bon Secours: 1829-1876 puis 1930-2006 : Maison de Retraite rue Saint-Martin
  • Sœurs du Cœur Immaculée de Marie (les Sabines): 1854-1939 : Orphelinat : 8-14 rue des Carreaux (desservent l’hospice Duflos)
  • Filles de la Charité de Saint Vincent de Paul: 1854-1923 : 2 établissements :   rue Saint Nicolas et rue Saint Michel, puis fusion dans une cour rue Charles Butor
  • Sœurs de Saint-Joseph: Ecole de Saint-Joseph de Navarin (elles reprendront aux Frères des Ecoles Chrétiennes le Collège de Saint-Joseph de Navarin
  • Les Dominicaines ou Filles du Calvaire: 15 rue Maquetra (à Saint-Martin) (Refuge Saint-Anne)
  • Les Sœurs Grises ou Filles de la Charité: boulevard de Clocheville (école Jules Ferry actuellement)
  • Les Frères des Ecoles Chrétiennes (1710-1905) : Fondent l’école et le collège Godefroy de Bouillon (1934) et St Joseph de Navarin + une école à Capécure

2.8 Singularité du Boulonnais : une très grande vitalité non pas catholique mais judéo-chrétienne

  • Communauté juive : Au XIX , Boulogne est l’unique ville du Pas-de-Calais a avoir une communauté juive

Boulogne est novatrice car la communauté s’affiche:

Une synagogue ouverte dès 1814 puis reconstruite Impasse Daunou en 1873. C’est la plus vieille du Nord Pas de Calais.

Lille pourtant avec une grande communauté n’aura sa 1ère synagogue qu’en 1891 soit 20 ans plus tard.

Une communauté impliquée dans la vie de la cité qui est accepté, reconnue, intégrée.

Elle détient de nombreux commerces rue de la Lampe et Grande Rue. Famille Berr et Kauffman, Lévy etc..

Nathan Berr (1826-1900) sera élu Conseiller municipal de Boulogne à la fin XIXème.

Boulogne apparaît comme un havre de paix : elle voit la naissance de l’Esperanto du juif universaliste docteur Ludvik Zamenhof, 1859-1917

  • Communauté protestante: Au XIXème siècle : la communauté protestante représente 10-15% de la population contre 1,5% à l’échelle nationale.
    • Boulogne est la ville la plus britannique des villes de l’Europe continentale : « la petite Londres de France »
    • Recensement de 1856 : 2414 étrangers sur 32742 habitants.
    • Wimereux s’inscrit comme un prolongement de Boulogne en étant l’un des rares hameaux du Boulonnais à compter une population britannique .
      • Recensement de 1896 : 6% de la population des hameaux Wimereux-Honvault (20 sur 348)
    • L’œcuménisme au rendez-vous: Le Boulonnais, grâce à Mgr Haffreingue, est même précurseur sur le plan national.

Le 22 octobre 1853 : un notable anglican Charles Cochrane réunit dans les salons de l’Institution Haffreingue des commerçants de la Haute Ville, des prêtres et des ministres de l’église anglicane concernant la fermeture des magasins le Dimanche. Les commerçants acceptent de fermer le dimanche de novembre à fin août.

Œcuménisme : Mouvement qui préconise l’union de toutes les Églises chrétiennes en une seule. Au sens littéraire : Tendance idéale à vouloir l’union entre toutes les personnes professant des idéologies différentes.

  • Des temples à Boulogne: Physiquement cela se traduit par la présence jusqu’à 6 temples anglicans et protestants soit deux fois plus qu’à Calais et autant que d’églises paroissiales catholiques,
    • Rue de St Martin en Haute ville en 1842
    • Eglise anglicane de la rue Félix Adam 1888 sous l’impulsion du révèrent père FRY par Thorold Lowdell architecte de Londres.
    • Chapelle Weleyenne érigée Grand Rue en 1890 par architecte Bell
    • Place des Capucins : Temple anglican The Holy Trinity Church (d’où provient l’orgue de l’église de Wimereux) (ancien couvent des Capucins)
    • Rue de l’ancien rivage
    • L’église réformée de France : un temple rue basse des Tintelleries en 1852.

2.9  La reconstruction de la cathédrale de Boulogne-sur-Mer : une bien singulière église !

Phare de la chrétienté ?

  • Boulogne avec un dôme de 101 mètres de haut est la 9ème plus haute église de France en 1879.
  • De nos jours 10ème plus haute (plus haute que Notre Dame de Paris ou le Sacré Cœur)
  • Sur le plan mondial : la cathédrale-basilique de Boulogne-sur-Mer = 18ème église la plus haute du monde
  • La cathédrale-basilique de Boulogne l’unique édifice néo-baroque italien en France.

Exemple : le plan additionnant croix latine et croix grecque se retrouve dans l’art baroque italien.

  • Le pragmatisme de Mgr Haffreingue, un concepteur et un chef de chantier plus qu’un architecte:

Dans ces mémoires Haffreingue écrit : « l’édifice doit toujours être le plus important monument de l’endroit et être aussi richement décoré que le demandent les exigences du culte et le permettent les ressources de la localité .»

  • Parmi les architectes qui collaboreront avec l’abbé Haffreingue :
    • Edouard Bettencourt
    • Albert Debayser, architecte municipal de la ville de Boulogne, la collaboration durera 3 mois.
    • Le polytechnicien Jules Marguet

  • Une cathédrale papales:
    • présence des armoiries des deux Papes successifs Grégoire XVI et Pie IX, pourquoi ?

    • Ces Papes ont participé à la construction de cet édifice (validation des plans, etc….). C’est un cas rarissime en France peut-être même unique.
    • Volonté de dire : le chef de l’église est le Pape.
    • Volonté de défendre une église catholique indépendante de l’administration française.
  • Réussite là où les autres ont échoué
    • Au XIXème siècle, sur les 6 projets de reconstruction de Cathédrale (entre parenthèses les dates de constructions) :
      • Cathédrale de Belley (1835-1853)
      • Cathédrale St Charles de Borromée à St Etienne (1830-1923)
      • Cathédrale de Moulins (agrandissement d’une nef et de 2 tours)
      • Cathédrale Notre Dame de Treille à Lille (1856-1999)
      • Cathédrale Sainte-Marie- Majeure de Marseille dite la Major
      • Cathédrale Notre-Dame   Boulogne-sur-Mer (1827-1855)
    • Sur les 6, deux seules furent menées à terme :
      • Cathédrale Sainte-Marie- Majeure de Marseille dite la Major
      • Cathédrale Notre-Dame   Boulogne-sur-Mer (1827-1855)
  • Concernant l’archevêché de Cambrai :
    • Cambrai : absence de projet de reconstruction.
    • Arras : lenteur interminable dans l’aménagement en cathédrale de l’église abbatiale St Vaast.
    • 1801 : projet de terminer l’abbatial inachevée à cause de la Révolution Française. La reconstruction de l’abbatial avait débuté en 1766. Depuis 1790, Il n’y pas de toiture.
    • il faut attendre 1826 pour que les 1er travaux commencent, soit 25 ans sans travaux.
    • il faut attendre la consécration du 28 mai 1833 pour que l’église abbatiale devenue cathédrale dispose d’une toiture.
    • Tous les autres projets d’aménagement sont abandonnés comme en 1851, l’abandon d’une tour de 78 m.
    • La cathédrale d’Arras est certainement l’unique cathédrale d’Europe a n’avoir pas de clocher ni de coupole.
    • L’erreur de Mgr de la Tour d’Auvergne est de n’avoir cherché que l’appui des institutions administratives et négligé les mécènes privés.
  • Mgr Haffreingue écrit « un édifice digne de la Reine du ciel ». Donc avec une liturgie à la hauteur …
  • Rétablissement de la procession entre 15 et le 30 août 1848
  • En1856 arrive pour la 1ère fois un train de 600 pèlerins conduits par l’abbé Hanicle, curé de Saint Séverin à Paris
  • En 1857, Mgr Parisis vient au 15 août pour ouvrir une série de pèlerinage qui se prolongera jusqu’au 30 août devant 50 000-80 000 participants selon l’Impartial .
  • Nombre de groupes :
    • 1857 119 groupes ;
    • 1860 : 140 groupes
    • 1865 : 152 groupes.
    • 2016 : 22 groupes….
  • Soulignons le caractère internationale de cette procession et ceci très tôt :
    • 1857 : notons la présence de l’évêque de Birmingham (Royaume-Uni) et celui de Toronto (Canada)
    • 1862 : archevêque de Corfou (Grèce), de Dublin (Irlande) du Vicaire apostilique d’Edimbourg
    • 1849 Ferdinand II des Deux-Siciles construit une église des Marins à Naples dont la plus belle des chapelles est dédiée à Notre-Dame de Boulogne.
  • L’expression liturgique au cours des fêtes religieuses allie l’aspect solennel et esprit festif.
  • Mgr Haffreingue et l’abbé Wallet fixent le cortège de la grande procession immuable pendant des décennies….
    • 1er: les paroisses de Boulogne et de sa banlieue symbolisaient dans leurs groupes les différents mystères de la Vierge
    • 2ème: cortège spécial de Notre Dame comprenant les congrégations religieuses, les prêtres, les autorités civiles , militaires et politiques de la ville.
    • 3ème: les prélats
    • 4ème le char de Notre Dame de Boulogne

A partir de 1885, le 1ère cortège intègre le cortège historique .

  • Un point de ralliement des catholiques des deux grandes puissances européennes et rivales

Mgr Haffreingue dans ses mémoires écrit ceci : « C’est que placé sur les limites de la France et de l’Angleterre entre les Invalides, la Ste Geneviève de Paris et le St Paul de Londres, son dôme qui se présentera comme le résumé des principaux sera pour ainsi dire le point intermédiaire, le foyer commun où viendront comme se refléter et se confondre les chefs d’œuvre de l’architecture religieuse de ces deux grandes cités ».

Boulogne, le point central, entre Paris et Londres comme sur le plan économique….

  • Volonté de matérialiser l’œcuménisme et la quête d’une paix universelle
  • Une volonté de faire une œuvre architecturale qui dépasse les frontières de la religion : Les appels à souscription insistent régulièrement pour : «faire appel aux dons ‘aux amis des arts’ pour cette église qui est là pour allier «  la religion, les arts et la société » écrit Mgr Haffreingue.
  • L’église Notre-Dame de Boulogne : cathédrale ou basilique ? Les deux à la fois !
    • Une Cathédrale :
      • Église mère d’un diocèse, où se trouve la cathèdre ( en latin, cathedra) c’est-à-dire le siège de l’évêque.
      • Une cathèdre : la cathèdre est le trône de l’évêque. Elle est le symbole de l’autorité, de l’enseignement et de la juridiction épiscopale, dans la liturgie catholique. Ce symbole est concrétisé par le siège de célébration de l’évêque dans sa cathédrale. C’est ce symbole qui permet de distinguer une cathédrale d’un église paroissiale
      • Boulogne est siège épiscopal jusqu’au VII et de 1559 à 1791.
      • Par décret apostolique du 23 novembre 1853 et décret de l’Empereur du 14 mars 1854, Mgr Parisis était autorisé à porter le titre d’évêque d’Arras de Boulogne et de St Omer
      • De fait et sans consécration officielle l’église Notre Dame reprend son titre de cathédrale perdu en 1791 d’autant plus que l’édifice actuel n’est qu’une reconstruction sur les fondations de la précédente.
    • Une Basilique:
      • Dans l’Église catholique romaine, une basilique est un titre honorifique donné par le pape à une église :
      • qui abrite le corps d’un saint ou une relique particulièrement vénéré et où des miracles se sont produits.
      • Qui est lieux de pèlerinage pour honorer soit Jésus-Christ, la Vierge Marie ou un saint.
      • On distingue :
        • les basiliques majeures (quatre églises de Rome)
        • les basiliques mineures (toutes celles à l’extérieure de Rome).
      • A peine 13 ans après sa consécration en 1866 , le Pape Léon XIII élève la nouvelle église Notre-Dame au rang de Basilique mineure le 14 avril 1879 symbolisé par l’Ombellino.
      • Etre élevé au rang basilique est un fait rare jusque 1905.
      • Aujourd’hui en France, il y a 170 basiliques :
      • 60% des églises élevées au rang de Basilique l’ont été après 1879 : 21 entre 1879 et 1905 et 80 depuis 1905.
      • Des cathédrales-basiliques : il n’y en a que 20 en France . En 1879 Boulogne il n’y en a que 8 et Boulogne est la 9e.
    • Le prêtre qui supervise les offices et la gestion d’une cathédrale est appelé archiprêtre (ou recteur-archiprêtre si celle-ci a en plus le rang de basilique).

MAIS TOUS CES FAITS ENTRAINENT DES QUESTIONS QUI NECESSITENT DES REPONSES que nous allons essayer d’aborder dans la 3e partie :

 

Comment expliquer ce dynamisme des religions ?

 

Commente expliquer la reconstruction de cette cathédrale ?

 

Quel est ce contexte social et économique qui le permet ?

 

  • En effet, il est Impossible de déconnecter la vie religieuse du reste des éléments constitutifs d’une société notamment ceux liés à la vie économique à la vie sociale, à la vie politique….