Homélie du Père Pierre Boidin du dimanche 9 juillet 2017

L'association AEICW
9 juillet 2017

Homélie du Père Pierre Boidin du dimanche 9 juillet 2017

Homélie du Père Pierre Boidin
du dimanche 9 juillet 2017

14e dimanche du Temps Ordinaire – Za 9, 9-10 – Ps 144, 1-2, 8-11, 13-14 – Rm 8, 9, 11-13 – Mt 11, 25-30

Le grand projet de Jésus, c’est de nous faire connaître et aimer son Père tout comme le Père veut nous faire connaître et aimer Jésus son Fils. Attardons nous donc sur le « profil » de Jésus.

Comme nous l’avons entendu au début de la 1ère lecture, Zacharie avait annoncé la venue d’un roi « juste et victorieux, pauvre et monté sur un âne, un ânon, sur le petit d’une ânesse ». Et l’Évangile vient de nous montrer Jésus qui loue son Père pour ce qui est révélé aux tout-petits, bien plus qu’aux sages et aux savants.

Par ailleurs Jésus veut être proche de ceux qui « peinent sous le poids du fardeau ».

Pour nous, ces propos sont-ils encore vraiment d’actualité ? Bon nombre d’entre vous venez de vivre durant cette semaine, ou fin juin, les « verdicts » scolaires concernant vos enfants, petits-enfants, et même arrières petits-enfants. Vous vous êtes peut-être attristés de l’échec de l’un ou l’autre. Ou bien votre joie a jailli à l’annonce de la montée en classe supérieure, joie de la réussite du bac, d’un concours d’entrée, de divers examens. Reconnaissons qu’actuellement le mot relatant l’objectif le plus recherché, le plus souhaité, c’est le mot « RÉUSSITE »… Ce n’est pas ce genre de mots que l’Évangile met en avant, mais plutôt les termes tels que « les tous petits », ou « le poids du fardeau ». Alors l’Évangile serait devenu un texte dépassé, inadapté ? Ou est-ce notre vie qui s’écarte du message de l’Évangile ?

Ce temps de vacances peut, si nous le voulons, nous permettre de rééquilibrer notre vie de chrétien, d’amis de Jésus, en méditant sur ces 3 thèmes :

  1. S’ACCEPTER SOI-MÊME
  2. ACCEPTER LES AUTRES
  3. ET PROGRESSER ENSEMBLE

-1- S’ACCEPTER SOI-MÊME

Personne ne s’est fait lui-même. C’est Dieu qui a créé la vie, cette vie que mes parents m’ont transmise. Je suis, chacun est, un exemplaire unique dans toute l’histoire de l’humanité. Nous pouvons, nous devons, chacun, chacune, nous accepter tels que Dieu nous a créés, avec nos qualités, avec nos limites, avec nos faiblesse, avec, à certains moments, des maladies, des contrariétés, des échecs. Pour certains, c’est le poids, la lourde charge d’un handicap survenu dès la naissance, ou en raison d’un accidents, de l’âge, ou de la maladie

Il est bon parfois de s’arrêter dans le silence, en pensant que Dieu continue de nous aimer, quelque soit notre parcours de vie, notre évolution dans la foi, notre cheminement. L’amour et la confiance que Dieu met en moi, en nous, c’est aussi l’espérance d’un chemin de croissance.

S’accepter et s’aimer soi-même, c’est, en quelque sorte, naviguer à égale distance entre « deux voies dangereuses ».

La « 1ère voie dangereuse » consiste à trop s’émerveiller de soi-même comme si on maîtrisait tout : « je me suis fait moi-même », « je ne dois rien à personne ! »… « Il suffit de vouloir ! » En réalité, nous devons presque tout aux autres, à nos parents, nos enseignants, aux producteurs de notre alimentation, de nos vêtements, à nos moyens de transport et de communication et à ceux qui en assurent le bon fonctionnement, et sans oublier le logement et tout le confort d’aujourd’hui, qui est le fruit du travail d’autrui.

La « 2e voie dangereuse », c’est celle d’une lourde mésestime de soi-même : en doutant de soi, en n’osant rien entreprendre.

Bref, les deux voies dangereuses qui nous font échouer : ce sont ou la surestime de soi, l’orgueil, le désir permanent de dépasser les autres, d’être le meilleur des hommes, le meilleur aux jeux, ou, à l’inverse, la conviction qu’on ne vaut pas grand chose, qu’on n’est pas capable de mener à bien un projet.., et on se laisse vivre, on attend tout des autres ; ce peut être aussi un état d’esprit issu d’une dépression.

L’équilibre, le projet de Dieu sur chacun, se situe entre les deux. Sous le regard de Dieu, prenons le temps de réfléchir à partir de cette conviction : « j’ai du prix aux yeux de Dieu ». « Jésus, tu t’es fait homme, tu as donné ta vie pour moi ! ». « Tu chemines avec moi », parce que tu m’aimes, pour qu’en t’aimant, en répondant à ton amour, je sois heureux.

-2- ACCEPTER LES AUTRES

Ah ! Si nous étions aussi indulgents, aussi compréhensifs, pour les autres, que nous le sommes pour nous-mêmes ! Ah ! Si nous donnions aux autres les mêmes excuses que nous nous donnons facilement à nous-mêmes.

Or tous les humains sont comme nous : enfants bien aimés de Dieu.

Et la Bible, avec Jésus, nous invitent à « aimer son prochain comme soi-même ». Çà veut dire aimer les autres, eux-aussi, tels qu’il sont …

Il n’est pas toujours facile d’aimer son conjoint, ses enfants, ses petits enfants, tels qu’il sont, et non tels qu’on voudrait qu’ils soient. On peut avoir des souhaits, mais il faut aussi aimer avec réalisme et vouloir vraiment que nos proches s’épanouissent. En pensant à l’époque où j’était travailleur social…, je me souviens d’un collègue qui avait parlé ainsi de sa fille Flora, devenue adulte : il nous avait dit : « quand Flora était petite, je l’imaginais « médecin ». Au fil des ans, je me suis dit que si elle était infirmière, ça serait déjà bien. Aujourd’hui, si elle trouvait une place, peu importe quel travail, dans une grande surface, je serais heureux ! »

C’est facile de parler des autres quand ont est célibataire ? Je fais quand même partie d’une famille nombreuse avec une bonne trentaine de neveux et nièces, petits-neveux et petites nièces. J’ai un neveu vétérinaire, et un petit neveu ingénieur. Deux de mes nièces et deux de mes petites-nièces sont enseignantes. J’ai aussi un neveu conducteur d’engins dans une entreprise de travaux publics. Il aime son métier, il s’y épanouit depuis des années malgré des déplacements souvent longs. J’ai un petit neveu qui était passionné le travail du bois. Il est devenu menuisier-ébéniste diplômé. Il continue à se perfectionner chez un ébéniste avec qui il s’entend à merveille. Quelle belle réussite !

Pour terminer avec ma famille : j’ai une nièce qui n’aimait pas du tout l’école. Très jeune, voici une quarantaine d’années, elle a commencé à travailler dans une grande surface au rayon « fromage »… Elle y est encore. Je l’admire énormément. Elle est joviale, épanouie. Pour elle, ce n’est pas vraiment l’argent qui est premier : ce sont les contacts ; elle aime rencontrer les personnes de sa clientèle. Malgré les horaires très variables et le travail certains dimanches, elle part joyeuse au travail où elle connaît et sert tellement de monde. Elle est rayonnante et favorise aussi beaucoup de liens vraiment amicaux dans tout son voisinage.

Voila deux personnes qui ont vraiment réussi leur vie. L’un : conducteur d’engins, l’autre : vendeuse de fromage. C’est tout l’importance du travail manuel et des dons propres à chacun. Selon les circonstances nous avons besoin et nous aimons bénéficier des services d’un bon couvreur, d’un bon électricien, d’un bon chauffagiste, d’un bon mécanicien. Chacun est important. Combien de personnes aux situations modestes sont indispensables, y compris celles qui nous débarrassent de toutes nos ordures ménagères, ou qui nettoient nos rues, sans oublier les personnes qui assurent les multiples services de l’aide à domicile, de la restauration, jour, nuit, dimanches et jours fériés.

Dieu nous a créés différents, certes, mais nous devenons aussi ce que nous sommes grâce à ceux que nous rencontrons dans notre vie au sein de notre société, de notre culture. Dieu nous a créés différents et complémentaires pour que nous puissions ensemble PROGRESSER…

– 3 – PROGRESSER…

Progresser, c’est : participer à la construction d’une société, comités, d’associations, de plus en plus fraternelles, où chacun a sa pierre à apporter. L’idéal est clair, mais la réalité est parfois sombre ou même très sombre.

Certes « mieux s’accepter soi-même et mieux accepter les autres », c’est déjà se donner les meilleures bases pour faire grandir partout l’amour, l’amitié, la fraternité, qui permettent à chacun de mieux servir, de grandir, selon ses capacités, ses talents et selon les besoins des autres.

Mais n’imaginons pas que c’est toujours facile. Les forces du mal sont à l’œuvre pour casser l’amour en nous et partout, le mal qui suscite des oppositions, des jalousies, des conflits. Il y a parfois, dans certaines vies, à certaines périodes, des épreuves, des problèmes, des ennuis de santé, des revers de situation, qui nous bouleversent, jusqu’à nous révolter, tellement certaines accumulations de problèmes, de souffrances, nous accablent, nous semblent injustes, jusqu’à nous faire douter, momentanément, de la bonté et de l’amour de Dieu !

C’est alors, plus que jamais, le moment d’entendre les paroles de Jésus qui a tout connu des épreuves de la vie, jusqu’à mourir sur la croix, pour nous entraîner ensuite dans sa résurrection et sa vie éternelle.

Écoutons, méditons, prions, éclairés par les paroles du Christ dans l’Évangile : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau. Et moi je vous procurerai le repos (…) », »Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme. »

CONCLUSION :

De ce temps de vacances, faisons un temps de renouveau, d’approfondissement, avec de nouveaux regards sur nous-mêmes, sur les autres, pour, ensemble, toujours progresser, soutenus par Jésus dont les derniers mots de l’Évangile d’aujourd’hui nous disent : « Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau léger. »

Amen